Bouillon de Talent #5 avec Lilian Mahoukou

Lilian Mahoukou est associé chez Canden qui développe 2 types de services : article par mois dans la rubrique Bouillon de Talent ! Pour ce mois de décembre c’est Lilian qui se prête au jeu des 10 questions, bonne lecture !

Lilian Mahoukou est associé chez canden qui développe 2 type de services :

  • L’accompagnement individuel personnalisé en distanciel en gestion de carrière et emploi avec id-carrières.com
  • Le conseil en stratégie organisationnelle et management des ressources humaines auprès d’entreprises, avec pour but de déclencher un saut qualitatif, générateur de performance et d’attractivité (Canden RH)

1. Plutôt gestion des compétences ou management des talents ?

Le management des talents marque sans doute l’acceptation et l’intégration des nouvelles dynamiques. Elles peuvent être hors-programme et aller au-delà des référentiels prédéterminés, sur un cycle large allant de l’écoute  (en interne comme en externe) à la gestion de la relation avec ceux qui ont quitté la structure.

La mondialisation et ses évolutions, ainsi que l’environnement démographique sont autant de déclencheurs possibles.

Avec l’émergence de nouvelles technologies, notamment sociales, de nouveaux challenges pointent leur nez, de nouvelles tâches et de nouveaux métiers voient le jour. 

Dans un contexte de raccourcissement des cycles d’innovation comme ceux-là, l’agilité et l’intégration effective de ces nouvelles problématiques (tout en restant en phase avec la mission de l’entreprise) sont deux points saillants pour rester en dynamique.

Aussi, avant de plonger dans ce qu’on appelerait le “management des talents”, la perception et la définition du mot “talent” peut varier d’une structure à une autre (ou encore d’un service à un autre) et induire des orientations diverses.

2. Qu’est-ce que le talent pour toi ?

Il s’agit d’un attribut individuel que l’on peut développer ou perdre.

Les conditions d’exercice et d’évolution sont déterminants, d’où l’importance de la qualité du management et de la posture proactive des personnes-mêmes.

3. Cite-nous une personne publique que tu considères comme un talent, et pourquoi ?

Seth Godin. Auteur de 13 best-sellers, narrateur d’histoires et penseur authentique ; quitte à être en rupture avec la masse et à être en phase avec un groupe de personnes partageant la même vision.

Ici, il ne s’agit guère d’élitisme mais de choix, de voix et d’authenticité. Vouloir être quelqu’un d’autre et se fondre dans la masse sont d’excellents moyens pour se rendre invisible.

Son talent réside dans la capacité à créer de l’émotion et à encourager le changement.

Il a d’ailleurs écrit un livre intitulé “Etes-vous indispensable ? : Libérez le linchpin” qui va dans ce sens-ci. En effet, un linchpin (pièce maîtresse) ne se contente de suivre des consignes. Bien au contraire, il interagit avec les personnes, crée du lien, joue le rôle de facilitateur de connexions et de découverte. Il a ainsi une posture proactive et use de ses capacités créatives.

4. Pourquoi parle-t-on tant de talent aujourd’hui ?

Deux explications probables : soit par pur effet de mode, soit par réelle compréhension des enjeux humains pour continuer à positivement évoluer. Les femmes et les hommes de l’entreprise constituent l’avantage concurrentiel majeur, car difficilement duplicable et basé sur de l’humain. Face à la complexité et aux exigences d’innovations, s’appuyer sur les talents est stratégique.

Les entreprises qui souhaitent intégrer ces dynamiques doivent avoir une définition claire et saine du mot “talent”, dans le sens où tout le collectif est bénéficiaire. A l’opposé, une culture de rock stars peut entamer la confiance et l’engagement des autres. Le but ultime est d’avoir une organisation talentueuse, ce qui est différent d’avoir une organisation disposant de quelques talents ; car une fois ces derniers partis, dans quelle situation se retrouverait la structure ?

5. Penses-tu qu’il existe une approche plus européenne qu’anglo-saxonne du talent ?

L’approche anglo-saxonne la plus communément perçue est celle des “top talents”, des “top performers”. Par exemple, dans une division commerciale, ce sont eux qui vont driver le chiffre d’affaires vers le haut. Et les autres, faut-il les remplacer au plus vite par d’autres “top talents” ? Ces derniers seront-ils si performants dans *votre* structure avec *votre* culture ?

Les enjeux de transformation des talents importent réellement et correspondent à la phase de développement si l’on garde en tête la vision cyclique classique de management des talents. Cela revient à se demander comment faire évoluer, faire grandir les salariés actuels. Si certains ont un talent très visible, d’autres ont certainement un potentiel à faire valoir.

Avec les impératifs de ‘fit’ culturel lié au management des talents, l’effort consenti  à la transformation devrait être suffisamment important et activement pensé en amont, pour éviter de se livrer dans une coûteuse chasse aux talents.

6. Les 3 priorités du management des talents ?

  1. S’aligner sur le sens que l’on donne au mot “talent”. Les actions futures se feront sur la base de cette définition.
  2. Valoriser les talents et maintenir la cohésion des équipes.  Si une personne est embauchée, c’est bien (et heureusement) pour une raison positive. Derrière tout ceci, il y a des enjeux de cohésion de groupe et de valeurs d’égalité.
  3. Plutôt tendre vers le développement d’une organisation talentueuse. Au final, ce qui est intéressant est d’avoir une vision holistique vis-à-vis de cette notion de talent. Il s’agit de mettre en relief les actions tendant à tirer le groupe entier, le collectif vers le haut, et à ne pas se focaliser sur des pratiques du type 80/20 qui peuvent entamer le niveau d’engagement.

7. Comment repère-t’on un talent quand on le croise ?

Par son esprit d’initiative, sa curiosité d’esprit et son goût pour apprendre et se développer, ou encore ses qualités relationnelles exceptionnelles.

L’orientation (je ne crois pas que ce soit le bon mot) du talent se fera dans le sens de l’acquisition de nouvelles compétences gagnantes.

Thomas Friedman (chroniqueur pour le New York Times) l’avait déjà souligné dans son livre “La Terre est plate”, ou encore Lynda Gratton (professeur à la London Business School) dans “The shift” avec le concept de “serial mastery”, où l’on va prendre conscience de ses habilités particulières et les actualiser au fil du temps.

8. Quels sont les 3 impairs à ne pas commettre avec un talent ?

  1. Ne pas faire confiance. Le micro-management et la surveillance excessive empêchent le talent de se développer au profit de l’entreprise. La confiance reste un des fondamentaux principaux pour aller dans le sens d’une collaboration efficiente.
  2. Ne pas reconnaître le talent. Nous parlions de la sur-focalisation sur les “top talents”, les fameux 20%. Il peut aussi arriver que des salariés disposent d’habilités spécifiques dans des domaines indirectement liés à l’entreprise mais tout aussi intéressants. Sans doute, est-il de la mission des managers de percevoir ces éléments différenciateurs et d’explorer les possibles synergies avec l’activité de l’entreprise ?
  3. Mettre le paquet dans l’acquisition de talents. Une fois les personnes embauchées, que se passe-t-il ? Quelle est la qualité de l’intégration ? Celles des actions de développement et de fidélisation ? Ici, il est question d’offrir une expérience-candidat *et* une expérience-salarié mobilisatrices.

9. As-tu du talent ou es-tu un talent?

Nous avons tous des habiletés à découvrir, à actionner, à développer 🙂

10. Quelles sont d’après toi les futures tendances de la gestion des  talents ?

Quelques idées…

  • Le risque du “talent washing”. La communication sur les talents est certainement attractive. Cela dit, le management des talents doit être couplée à des actions réelles menées en interne, et aller au-delà de l’adoption de quelconque technologie.
  • D’un point de vue purement technologique, nous avons l’évolution des smartphones et surtout des tablettes tactiles. De la phase d’identification à celle de fidélisation, ils peuvent servir de supports attractifs de communication comme d’apprentissage. L’essentiel est de s’adapter aux univers des salariés et d’offrir plusieurs alternatives d’expérience.
  • Les départs à la retraite ont souvent été mis en relief, et restent des indicateurs démographiques solides et durables. Face à un rétrécissement progressif des pools de talent, quelles réponses donner ? C’est là aussi où le travail à distance peut prendre une place car la connaissance est mobile. Nous le voyons déjà rien qu’en blogguant en français, nous sommes potentiellement connectés avec des personnes dans le monde entier, ayant une connexion web et comprenant le français.
  • Au vu de la conjoncture économique actuelle, notamment dans la zone euro, les efforts d’optimisation de l’expérience-salarié seront décisifs pour favoriser les dynamiques de cooptation (dans le cas de besoins en recrutement externe) et abaisser le coût de l’embauche.
  • Par ailleurs, une internalisation des recrutements supportée par l’acquisition de nouvelles compétences, va dans le sens d’une réduction des coûts et de la recherche optimale de l’adéquation avec la culture de l’entreprise. Via la recherche d’un équilibre entre recrutement et développement interne, on va également favoriser la diversité, soit l’ouverture.
  • Une vraie vision “glocale” pour les entreprises à envergure internationale. En effet, même si un socle commun existe, les pratiques en management des talents doivent intégrer les spécificités locales, d’où l’importante phase d’écoute et de recherche pour récupérer les bons insights.
  • Une DRH en collaboration plus étroite et plus stratégique avec le P-DG (approche “business partner”), pour connecter “stratégie d’entreprise” et “management des talents” avec le plus d’efficience possible ; et aussi, de par ces mouvements, une DRH qui démontre qu’il crée de la valeur et qui brise l’image traditionnelle du centre de coûts. Le management et la politique RH sont d’ailleurs des leviers réels pour faire le design d’un environnement propice à la révélation des talents et créer de la valeur.
  • La focalisation sur le concept d’organisation talentueuse, comme nous l’avons vu plus haut dans cette interview, et une accentuation des initiatives de “talent intelligence” de manière à rester le plus en phase avec ses effectifs. Etre une organisation talentueuse, c’est aussi viser l’excellence professionnelle, apprendre en permanence et cultiver l’ouverture.