En sortant de la très belle édition de TruSourcing Paris 2016, et étant en plein SOSUEU, je me pose ces sempiternelles questions : tout le monde peut-il vraiment devenir sourceur ? Ou a minima participer au processus de recrutement ? Et si oui, l’avis de tous est-il d’égal importance ? Et si ce n’est pas le cas, qui peut ou doit déterminer la pondération des voix des contributeurs ? Bref, autant de questions que se posent les sourceurs et recruteurs du monde entier…. Voici quelques éléments de réflexion.
Le sourcing est-il vraiment devenu collaboratif ?
Il apparaît de façon assez claire que le sourcing est devenu, implicitement ou explicitement, une activité collaborative à laquelle tout le monde peut participer. Implicitement car lorsque vous parlez d’une entreprise (qui ne recrute peut-être même pas) à un ami (qui ne cherche peut-être même pas à changer de job) lors d’un diner ou que vous vantez les mérites d’un ami à un recruteur lors de ce même diner, vous faites tel Monsieur Jourdain du sourcing sans le savoir. Le sourcing pouvant se définir comme l’art d’engager des personnes à rejoindre une entreprise, de façon plus ou moins proactive, comme le dirait mon ami Laurent Brouat. Pour être plus précis, vous vous attelez à deux des tâches du sourceur qui consiste à identifier et engager.
Si l’omniprésence du digital dans nos vies et la sur-connexion nous transforment tous potentiellement en entremetteurs pour le compte de notre entreprise ou de nos amis, la principale difficulté pour un sourceur professionnel reste de savoir comment bénéficier de cette « chasse » débridée qui s’opère tous les jours sans même qu’il ne le sache. Il serait alors moins question pour lui de devenir un super hacker pouvant dénicher un email dans la jungle du web que d’apprendre à tirer un plus grand profit des interactions intervenant au sein de son réseau.
Donc oui, le sourcing a un potentiel collaboratif extraordinaire, reste à savoir comment exploiter ce potentiel en organisant et optimisant la collaboration. L’un des buts recherchés restant d’intéresser les gens qui nous intéressent…
Doit-on, pour être intéressant, être désintéressé ?
De l’avis de tous, les talents les plus recherchés en ont assez de se faire « draguer » sur Linkedin, comprendre recevoir des emails extrêmement personnels du type : « votre profil nous intéresse, tenté par le fait de rejoindre une magnifique entreprise trop sympa ? ». Bien évidemment, toute le monde sait que tenter ce type d’approche dans une relation amoureuse n’a quasiment aucune chance de réussir. Cela ne semble pourtant pas choquer beaucoup de recruteurs quand il s’agit d’une relation professionnelle.
L’apparent paradoxe réside dans le fait que pour être intéressant, il faut être – ou tout du moins paraître – désintéressé. Ce qui séduira un profil convoité viendra de l’intérêt franc et sincère que vous lui porterez. Il s’agit de créer du lien, d’échanger du contenu, de susciter sa curiosité. Et cela doit se faire dans la durée. Ce qui sous-tend que vous vous intéressiez réellement à la dite personne sans chercher à « conclure » immédiatement. De cette relation naîtra une future relation professionnelle, ou pas. Mais rien ne sert de vouloir forcer l’intérêt que quelqu’un peut vous porter.
Cela requiert bien entendu un élément indispensable : l’anticipation ! Si vous entamez une telle démarche au moment même ou votre besoin émerge, autant dire que l’intérêt de ce paragraphe est nettement moindre. L’enjeu est d’anticiper suffisamment sur ses futurs (ou probables) besoins afin de constituer des viviers de talents avec lesquels bâtir une relation sur une période de temps de quelques mois au moins.
Doit-on avoir des étoiles dans les yeux pour recruter quelqu’un ?
Dénicher les profils qui feront la différence au sein d’une entreprise reste l’une des tâches importantes du sourceur. Pourtant, quand un tel profil a été identifié, rien n’est fait ! Ou plus exactement, le plus dur reste à faire. Le plus dur étant de convaincre ces personnes de s’engager – si possible durablement et efficacement – pour la cause de l’entreprise concernée. Pour ce faire, rien de mieux que d’impliquer les personnes qui sauront à la fois décrire de façon claire et convaincante comment fonctionne l’entreprise, sa culture, en quoi consisterait le job à pourvoir, etc.
Si le manager doit évidemment être impliqué, qu’est-ce qu’un sourceur doit lui répondre si celui-ci a pour unique feedback concernant la personne présentée : « bien, mais je n’ai pas eu d’étoiles dans les yeux » ? Faut-il vraiment avoir des étoiles dans les yeux pour recruteur quelqu’un ? Il ne s’agit pas d’une quête amoureuse. Et pour autant, cela a-t-il du sens d’aller au bout d’un recrutement si le manager concerné ne le « sent pas » ? Oui cela reste subjectif, mais c’est cette même subjectivité qui fera que le collaborateur pourra ou non s’épanouir…. Doit-on demander au manager de faire le maximum pour s’entendre avec ce candidat qui répond en tous points aux besoins du job et à la culture de l’entreprise ?
Ce qui renvoie à la question de savoir qui doit, in fine, valider un recrutement : le recruteur ou le manager pour le compte duquel travaille le recruteur ? Difficile d’apporter une réponse universelle…. Mais si vous ne vous la posez pas et n’y apportez pas une réponse claire au sein de l’entreprise, voire au cas par cas, vous avez de bonnes chances de voir poindre des désaccords ou des conflits. Et à la fin voir le candidat interrompre sa période d’essai.
Quid des profils ne correspondant à aucun poste ?
Recrute-t-on des personnes ou pourvoit-on à un poste ? Les deux mon capitaine… Le problème est qu’il faut une certaine maturité ou marge de manœuvre pour sereinement envisager le recrutement d’une personne n’entrant dans aucune case ou ne venant pas répondre à un poste vacant. Selon notre amour du risque, nous avons plus ou moins besoin de nous sentir en terrain connu. Par conséquent, un profil atypique, au parcours étrange ou ne correspondant à aucun poste existant effraiera les plus téméraires dans 90% des cas.
Encore récemment, j’ai failli au sein de ma propre entreprise passer à côté d’un véritable talent car le profil atypique en question n’entrait dans aucune case. Après l’avoir gentiment expliqué à la personne concernée, le recruteur qui avait organiser la première rencontre a su changer d’avis à la suite d’une discussion avec un autre collaborateur. Pour finalement embaucher le candidat en question. Ce qui tend à montrer que même si l’on peut parfois « passer à côté », il n’est jamais trop tard pour se remettre en question et se rattraper. Ou en tout cas essayer….
En conclusion, pour bien sourcer, mieux vaut le faire à plusieurs, être sincère, prendre son temps, et se fier à son instinct. Alors risquons-nous vraiment de nous faire remplacer par des robots ? La suite au prochain épisode 😉