Tout commence par une statistique : nous sommes la moyenne des 5 personnes avec lesquelles nous passons le plus de temps. Ce chiffre peut être un bol d’air frais pour certains, un cauchemar pour d’autres. Si vous faites partie de la première catégorie, félicitations, il y a de quoi être fier ! Pour les autres, rien n’est permanent.
L’une des citations les plus célèbres de l’entrepreneur et coach en développement personnel Jim Rohn sous-entendrait donc que nous avons peu de conscience propre et que nous nous laissons influencer par notre entourage au point d’en oublier qui nous sommes. Les américains ont en effet une expression parfaite pour définir ce phénomène ; la « peer pressure » ou « pression des paires » en traduction littérale. A croire que les français n’ont pas vraiment de mot pour définir ce phénomène. Ce qui peut sembler assez ironique au vu de notre système éducatif et de la reproduction sociale observée dans le milieu du travail.
Initialement, la reproduction sociale désigne le phénomène sociologique « d’immobilisme social intergénérationnel ». On la retrouve dans de nombreux pays du monde, même dans les pays Occidentaux, présumés plus développés et libres. Attardons nous sur le cas de la France dans les choix de l’orientation professionnelle. Après avoir été influencés par nos parents pour choisir telle ou telle voie professionnelle – à nouveau, phénomène assez classique partout dans le monde – les français se retrouvent soumis à une seconde pression : celle du système éducatif. En effet, nos parcours de formation sont pour la plupart d’entre eux mono-disciplinaires et une fois la filière d’étude choisie, il est compliqué d’aller regarder ailleurs où l’herbe est peut-être plus verte.
Nous avons beaucoup à envier au système américain qui, bien qu’il soit plus onéreux, permet à un étudiant de prendre une majeur « Business » avec une option mineure en « Ecriture de scénario ». Et puis éventuellement, de se rendre compte par la suite qu’il s’est trompé de voie et de remplacer le Business par des Sciences Politiques ou de la Criminologie. Le tout dans un environnement favorisant l’exploration de soi et de ses envies et dans lequel on côtoie ainsi des médecins/musiciens, des producteurs/sociologues ou des mathématiciens/écrivains. Cela ouvre automatiquement les perspectives d’épanouissement et donne une grande diversité du fameux cercle des 5 personnes. On se construit donc petit à petit avec des personnes ayant différentes visions de la vie et la joie.
En France, le schéma est plus restreint : les étudiants juristes se retrouveront avec leurs semblables, de même pour les médecins, les architectes, les ingénieurs ou les historiens. On se retrouve ainsi vite avec 5 personnes de notre entourage réalisant les mêmes études que nous et provenant donc mécaniquement d’un milieu social similaire. Une certaine définition du bonheur et de la réussite s’impose rapidement à nous et l’on se sent vite aspiré dans une spirale qui permet difficilement de rester maîtres de nos envies mais surtout, maîtres de ce qui nous rendra heureux au travail mais aussi dans la vie.
- Un étudiant en médecine devra choisir certaines spécialités afin d’être bien payé ;
- Un juriste devra opter pour une liste restreinte de domaines du droit afin de défendre les cas les plus prestigieux ;
- Les voies royales en école de commerce sont le conseil et la finance ;
- Le normalien devra devenir doctorant pour être respecté.
Et au delà de l’aspect professionnel, c’est une définition du mode de vie, du bonheur et de la réussite qui s’impose petit à petit à nous : fréquenter tel ou tel quartier/boite/restaurant, devenir propriétaire ou non, se marier ou non, et à quel âge, avoir des enfants, partir à l’étranger, « se faire les dents » dans une grande entreprise… Le tout pour rentrer dans la case d’un métier que l’on a choisit à 18 ans et dans lequel les codes sont bien définis. Pas évident d’être le mouton noir du troupeau qui essaye de changer la donne et d’imposer son bonheur et sa vision de la réussite.
A 27 ans, je me retrouve perdue dans ce schéma et cette statistique m’a fait froid dans le dos lorsque je l’ai entendue il y a 2 mois. Je ressens aujourd’hui le besoin de reconnecter avec des personnes différentes de celles connues en école de commerce car j’ai l’impression de m’être perdue au cours des 10 dernières années, en me laissant emporter par ce que j’appelle « la vague de mes études supérieures ». Je prends aujourd’hui le temps de réfléchir à ma définition du bonheur et je n’ai effectivement pas de « métier » qui y colle parfaitement mais j’aime bien l’idée de me dire qu’il y a autant de métiers que d’individus.
Parce qu’aujourd’hui, je suis un peu ce qu’on pourrait appeler une « multipolaire ». J’ai la soif de justice d’un avocat, l’envie d’écouter et de soigner d’un médecin, le désir de faire rire d’un humoriste, le besoin de créer d’un artiste, la nécessité d’être zen du yogi mais surtout le rêve de fédérer et de permettre à chacun de se sentir plus épanoui chaque jour.
Le vrai bonheur revient donc à savoir sortir du schéma classique du système français et à aller explorer de nouveaux horizons en vous écoutant mieux pour pouvoir trouver VOTRE métier. En espérant que cet article vous donne envie de vous entourer des 5 bonnes personnes, à commencer par vous-même.
Marie Rouhban
Business Developer – Cartesia Education