Ca y’est, une nouvelle étape du déconfinement est franchie et le retour au bureau encouragé. Ou a minima, facilité. Mais cette date n’est pas vécue par tous de la même manière. Pour les RH, c’est assurément un nouveau casse-tête. Pour certains collaborateurs et collaboratrices, la perspective de retrouver ses collègues ressemble à celle de la rentrée des classes, quand ces mêmes personnes étaient heureuses à l’idée de retrouver leurs copines et copains. Quand pour les autres (dont je faisais partie), la phobie de l’enfermement dans une salle de classe surpassait de loin la joie de retrouver ses camarades. Mais il se pourrait bien que la tâche la plus ardue soit – comme assez régulièrement – réservée aux managers.
Les managers vont en effet se retrouver entre le marteau et l’enclume. D’un côté les dirigeants vont attendre d’eux qu’ils surfent sur une éventuelle reprise. De l’autre, les membres de leurs équipes vont attendre d’eux qu’ils fassent du sur-mesure afin de répondre à leurs différentes attentes, ambitions, contraintes. Pour la plupart révélées pendant cette année pour le moins étrange (cf. article sur la théorie de la papaye). D’un côté la productivité, de l’autre la satisfaction et la rétention des talents (sachant que l’un ne va évidemment pas sans l’autre…).
Comment combiner des demandes individuelles, qui peuvent parfois être rigoureusement opposées avec les besoins du collectif ? Où sera l’équilibre ? Cet équilibre est-il seulement envisageable ? Faut-il sonner la fin de la récré et revenir au bon vieux one size fits all ? Et quand bien même la prise de conscience que rien ne sera plus comme avant aurait été effectuée, comment s’y prendre ? Qui pour aider ces braves managers à se doter de nouveaux outils, à inventer de nouvelles pratiques ? Pour faire face à ce qui ressemble à une véritable plongée dans l’inconnu. Voici quelques pistes de réflexion.
N’ayez pas peur de ne pas savoir
Amis managers, bonne nouvelle. Si vous ne savez pas à quelle sauce vous allez être mangés ni comment vous allez vous y prendre, vous n’êtes pas seuls ! Si cela n’est pas une consolation immédiate, cela autorise a minima à tenter sereinement de trouver sa voie, puisqu’il n’y en a pas une toute tracée. Tout le monde se trouvant confronté à quasiment autant de situations nouvelles qu’il y a de personnes…. En revanche, ne pas savoir ne veut pas dire qu’il ne va pas falloir – beaucoup – travailler pour élaborer de nouveaux réflexes, de nouvelles habitudes, de nouvelles pratiques. En jonglant entre le cadre défini par la RH et les dirigeants, et la réalité des attentes terrain.
Comment réagir face à quelqu’un vous annonçant qu’il a déménagé durant l’un des confinements (en oubliant incidemment de vous le dire…) ? Ce qui pourrait nuire quelque peu à l’animation de vos réunions traditionnelles du lundi matin en présentiel. Que répondre à quelqu’un vous annonçant qu’il ne souhaite pas revenir au bureau (mais genre jamais), se sentant beaucoup plus efficace à la maison ? Ou qu’il partira du bureau à 17h pour s’adonner à des activités personnelles, en vous jurant qu’il reprendra le travail après le diner ?
Ou encore à ce(tte) collègue vous demandant expressément de ne plus lui assigner de projets trop « visibles » ou par trop pressurisant, ne souhaitant plus consacrer la même énergie au travail que précédemment ? Plutôt que d’y voir un signe de démotivation ou de désengagement, constatez plutôt l’éclosion de nouvelles attentes, et imaginez les méthodes de rétention et de motivation des talents qui vont avec.
Ne vous rassurez pas avec les bonnes vieilles méthodes
Dans le monde d’avant, amis managers, oui, vous auriez pu réagir de façon vive et spontanée à tous ces facteurs de déstabilisation. Mais le problème que vous rencontrez est tout à fait connu, et est assez proche de celui ou celle qui a appris à jouer au tennis en prenant certaines habitudes (j’aurais pu prendre n’importe quel autre sport ou instrument de musique, la métaphore marche aussi bien…), et à qui l’on va demander de (re)prendre des cours afin de progresser. Pendant un certain laps de temps, cette personne ne saura plus jouer du tout ! N’ayant plus les gestes d’hier et pas encore ceux de demain. La tentation est alors grande de revenir à ses bons vieux fondamentaux et de tout envoyer balader dès que le premier match amical sans aucun enjeu pointera le bout de son nez.
Si vous souhaitez poursuivre le voyage en continuant de vous améliorer, tant dans un souci d’efficacité de l’entreprise que d’engagements de vos talents, vous devez inévitablement vous retrousser les manches, et retrouvez « l’oeil du tigre » de vos débuts (très belle référence cinématographique je sais). Celui qui vous a permis de faire vos gammes et développer votre style de management, répondant à qui vous êtes, à ce qu’attend votre entreprise et ce qu’attendent vos talents. Un Ikigaï du management en quelque sorte.
Les milliers de webinaires dédiés au sujets peuvent vous aider, tout comme la lecture d’articles, la concertation avec vos pairs, etc. Mais votre meilleur atout reste les membres de votre équipe eux-mêmes ! Ils sont assurément les mieux placés pour élaborer les solutions à ces nouveaux problèmes. Dans le respect du cadre que vous fixerez, évidemment.
Faites primer l’intérêt du collectif
Finalement, dans cette période incertaine et complexe, la seule boussole qui vaille est celle de l’intérêt du collectif ! Car si la prise en compte des contraintes individuelles est – et aurait toujours dû être – essentielle, cela ne peut se faire au détriment de l’intérêt du collectif !
Si les membres d’une équipe ont besoin de suivre des rites, habitudes, pratiques pour bien fonctionner, charge à chacun d’adapter ses contraintes individuelles en fonction des besoins du collectif. Ok, on peut préférer rester bosser de chez soi. Ok, on peut décider d’aller vivre au bout du monde. Ok, on peut ne pas vouloir mettre sa caméra lors des visioconférences. Mais in fine, son besoin ou désir individuel doit-il nuire à la bonne marche de l’équipe ? Veut-on réellement se transformer en individualistes forcenés ? Quelle approche avons-nous de la vie en société, le fameux « vivre ensemble » dont on entend parler à tort et à travers, à la sortie (?) de cette crise ?
Cet assouplissement des règles concernant le télétravail constitue en réalité l’opportunité d’un vrai débat sur les besoins, attentes, contraintes, ambitions collectives de l’équipe, et pas seulement des membres qui la composent ! Encore faut-il que le manager ait l’envie, l’énergie, la « gnak » suffisante pour lancer cette concertation d’une part, et avoir le leadership nécessaire d’autre part pour fixer un cap inspirant et fédérateur. Sans forcément avoir – encore – toutes les compétences en la matière. Et c’est là que la RH peut jouer un rôle crucial, en accompagnant et supportant au mieux le manager dans sa quête.
Alors, ami(e)s RH, collaboratrices, managers, comment vivez-vous cette nouvelle étape ? Vous sentez-vous prêt(e)s à vous réinventer ? A affronter l’inconnu ? Une nouvelle fois ? A vos commentaires !