Le talent est aujourd’hui omniprésent dans le monde de l’entreprise.
Il y a quelques années encore, le mot talent était réservé aux artistes. On disait d’un acteur ou d’un réalisateur en sortant du cinéma qu’il avait un talent fou. On l’utilisait aussi pour les sportifs, quand on voyait Usain Bolt battre le record du monde au 100 mètres après avoir copieusement ignoré les règles de base de l’échauffement.
Le talent désignait une personne ayant ce petit quelque chose de magique, d’exceptionnel, que l’on n’arrive pas à décrire, qui n’appartient qu’à elle…
On recherche à présent à déceler ces magiciens de l’entreprise, ceux qui pourront à un moment donné produire un exploit et permettre à l’entreprise de se démarquer de ses concurrentes.
Vous voulez quelques exemples ?
- le chef de projet qui respecte toujours les délais sans épuiser ses équipes,
- le commercial du bureau voisin qui fait chaque année 150% de ses objectifs, crise ou pas,
- le développeur informatique qui trouve toujours la « recette miracle » pour répondre à vos demandes,
- ou encore Jonathan Hive qui après avoir créé le design de l’iMac et de l’iPod a tout simplement révolutionné le monde de la téléphonie mobile avec l’iPhone.
Ces talents sont aujourd’hui considérés comme des pépites que l’entreprise doit savoir à tout prix conserver.
Le cas est exposé. La question du jour consiste a se demander pourquoi cela est-il plus nécessaire aujourd’hui qu’il y a 20 ans ?
Puisque tu sollicites des avis, voilà le mien. Le personnel, quelque soit son niveau de compétence, n’est plus intégré comme auparavant dans l’entreprise. On trouve un emploi qui ne sera sans doute pas celui de toute une vie. On est donc moins impliqué dans le devenir de l’entreprise sur un long terme, ce qui n’encourage pas à s’investir plus que nécessaire. De plus, on se rend compte que le patronnat ne récompense pas à sa juste valeur les services rendus qui rentrent vite dans une normalité de travail ( je ne parle pas seulement de salaire mais aussi de simple reconnaissance ). Travailler pour un patron, pour l’entreprise, dans le respect aveugle de la hierarchie n’est plus accepté aujourd’hui. Beaucoup de bonnes volontés ont été exploitées par le passé et les générations actuelles ne veulent plus de ce système. Certes, on tombe peut être dans un excès de laisser aller mais il répond naturellement aux excès inverses passés. Les talents existent, reste à les valoriser sans les sur-exploiter. Dans un monde économiquement et socialement difficile, ils prennent toute leur valeur.
Je partage ce qui est écrit précédemment, mais Il y a, de ce que je constate dans nombre d’entreprises, un autre frein important à l’expression des talents, ce sont les modes organisationnels. Ce qui revient à dire, pour être davantage dans l’esprit me semble-t-il souhaité par Alexandre, d’être positif et pas seulement de pointer les obstacles, qu’il est nécessaire de questionner les modes organisationnels pour qu’ils (re)deviennent une base de lancement de l’expression des talents. Aujourd’hui, les modes d’organisation dominants, sous prétexte de développer l’autonomie, la prise d’initiative et la responsabilité, ont surtout développé l’injonction paradoxale et la cacophonie des processus. Dans les organisations éclatées, matricielles, en lignes hiérarchico-fonctionnelles, trop de talents s’épuisent à contourner les processus de prise de décision, de contrôle et d’évaluation pour réaliser des prescriptions parfois contradictoires en fonction de leur double origine, dont un troisième circuit leur refuse les moyens pendant qu’un quatrième maintien la pression sur les résultats à atteindre. Même Usain Bolt, avec des semelles de plombs, un sac de 50 kgs et devant se méfier des croches pieds, finit par aller moins vite….
Tout à fait d’accord. Mais pour quelles raisons ces systèmes se sont ils imposés ? Je veux dire par là qu’il me semble que ce sont des facteurs avant tout humains et relationnels qui président à la mise en place de la structure telle qu’elle se présente. Un simple changement organisationnel ne peut être effectif et efficace à lui seul.
Certes beaucoup de talents sont présents dans l’entreprise, mais bien souvent non reconnus. Lorsque des idées innovantes sont proposées aujourd’hui, elles se heurtent bien souvent à la hiérarchie, à des jalousies, à un attentisme et à une volonté de ne pas bouger ce qui est en place. D’où des difficultés à se faire entendre. Effectivement, le fait de passer par une personne extérieure, à l’esprit ouvert, qui travaillerait en collaboration avec la direction pourrait être une possibilité.
Quand aux personnes (chef de projet ou autres) qui font bien leur travail, cela est considéré comme « normal » et même, on leur en demande toujours plus, sans forcément reconnaître ce qui a été fait, voire bien fait ! C’est la politique du « toujours plus » qui est aujourd’hui appliquée en entreprise. La pressurisation des individus, jusqu’à les jeter quand ils n’en peuvent plus. Il y a 20 ans, la politique était plutôt de valoriser les individus en leur apportant, via des formations, une spécificité liée à l’entreprise. Désolée de ne pas être plus positive sur le sujet !!!
Vous devriez dire « qui devraient présider » (ou en tous les cas être fortement intégré lors de la mise en place de la structure). C’est en réalité aujourd’hui un facteur (le facteur humain) sous estimé et instrumentalisé, sensé s’adapter parfaitement à la logique, notamment des systèmes d’informations, pour que, dans tous les cas, 2 et 2 fassent 4, comme c’est écrit sur le power point qui présente la nouvelle organisation, avec les cadres de délégation, les espaces d’autonomie et les interdépendances qui en découlent. Dans la vraie vie, ça se traduit par beaucoup d’inefficacité et de souffrance au travail, en particulier pour le management intermédiaire. C’est en tout cas ce que j’observe, particulièrement dans l’industrie.
Côté systèmes informatiques, on voit émerger une nouvelle tendance. On passe petit à petit de systèmes lourds comme les ERP à des systèmes plus flexibles et davantage tournés vers les utilisateurs finaux comme les Best of Breed. Les réseaux sociaux vont même au-delà puisqu’ils sont exclusivement alimentés par les utilisateurs eux-mêmes.
C’est à mon sens l’une des raisons pour lesquelles les collaborateurs de l’entreprise ont le sentiment qu’ils peuvent s’exprimer davantage, qu’ils ont davantage de liberté, et deviennent donc moins enclin à subir tout et n’importe quoi.
L’une des questions fondamentales est de savoir si cela est vrai pour tous les collaborateurs de l’entreprise, ou seulement ceux qui sont assez haut placés dans la hiérarchie…
Merci pour ta réponse, le but est précisément d’avoir le retour d’expérience de chacun.
Le fait que l’on souhaite retenir les talents de l’entreprise relève effectivement moins d’une dynamique humaniste que d’une volonté de l’entreprise d’être toujours plus performante.
Là où l’époque actuelle devient intéressante est que la nouvelle génération qui arrive sur le marché du travail est moins enclin à se faire pressuriser. Ou en tout cas, cette génération demande de la visibilité sur son parcours, sur les opportunités qui s’ouvriront au sein de l’entreprise. C’est donnant-donnant…
Cette génération influe selon moi positivement sur l’ensemble de l’entreprise car elle oblige les managers à tenir compte de facteurs tels que la motivation, la satisfaction ou l’enthousiasme.
Mais cela est plus « en cours » que réellement ancré dans les mentalités. A suivre
Je reviens sur tes best of breed de ta réponse précédente.Ce n’est à mon avis peut-être pas seulement une question de hiérarchie, mais de nature du travail. Dans le tertiaire, (je n’entends pas tertiaire que le marché des services et de l’immatériel, l’industrie aussi à son tertiaire avec le commercial, le markéting ou la R & D), les maîtres mots étant l’innovation et la créativité, les systèmes segmentés sont probablement plus appropriés et peuvent rencontrer, efficacité pour l’entreprise et expression des talents. Mais dans la production, on voit beaucoup plus, malgré les annonces stratégiques ou les affichages managériaux, de pilotage par les coûts que par les objectifs (dans un contexte de concurrence mondiale exacerbée par la crise) avec donc une forte volonté de pilotage par le haut et donc de systèmes intégrés. Je te rejoins sur les exigences de la nouvelle génération, avec parfois le revers d’une ambition tournée vers la réalisation de son talent personnel qui n’épouse pas forcément l’intérêt du collectif, sachant que les entreprises ne font pas grand chose pour qu’il en soit autrement. Finalement, c’est vachement dur de sauver le monde. Vivement la retraite.
Plus philosophique:
Par définition le mot « talent » met en scène un aspect très relatif de l’objet, artiste, sportif…observé.
Et qui dit « relatif » dit éléments extérieurs au résultat obtenu. Donc on ne parlait pas de « talents » avant au sein de l’entreprise peut-être parceque seuls les résultats étaient observés. De nos jours l’entreprise s’humanise (aller on y croit) et de nouveaux services se créent, se développent…Reporting, Ressources Humaines, SI…Il y a plus d’analyses, donc plus de critères observés…et naissent alors les talents des employés. Parcequ’on accorde à un bon ou à un mauvais résultat d’autres critères que le seul QI de l’employé. Et tout cela est possible en grande partie, à l’informatique: qui permet de recouper les infos, ce, grâce aux logiciels de plus en plus performants. Parceque quelquepart, le virtuel prend le dessus…
Au quotidien, l’homme s’écoute bien plus qu’avant aussi…il cherche a se comprendre :spy, sophro…
cela est vrai aussi bien dans sa vie « perso » que « pro » ce pour se révèler à lui même et aux yeux de tous. Et l’entreprise l’a bien ingtègré: bilan de compétences, EAA…La notion de talent apparait certainement dans l’entreprise grâce a une prise de conscience individuelle et collective!
Très juste Sandrine… Je pense que le caractère « relatif » du talent et les critères d’identification ne sont pas pour rien dans l’émergence de ce terme en entreprise.
Pour ce qui est de l’humanisation de l’entreprise, c’est clairement la cible à atteindre. Les constats sur ce point sont cependant contradictoires. D’un côté on aménage du temps aux collaborateurs pour équilibrer vie professionnelle et vie privée, et de l’autre on parque les gens dans de gigantesques open-space et on accroît la pression au quotidien.
J’espère que le blog nous permettra d’avoir une vision assez large et fidèle de la vie en entreprise.
Je partage vos points de vue mais il me semble difficile d’avoir cette vue globale de la vie en entreprise. En effet, travailler dans une PME ou dans une grosse structure est très différent. Et au sein des PME, les conditions de travail sont elles mêmes très diverses en fonction du personnel et des dirigeants, d’autant plus qu’en fonction des secteurs d’activité concernés les objectifs et la philosophie d’entreprise peuvent être présentés de façon significativement variés. Quoiqu’il en soit, il est évident que dans l’idéal, aller vers plus d’humanisme ne peut être que positif. Encore faut il que tous les protagonistes et partenaires soient dans la même démarche.
…Voyons, voyons, il me semble que par rapport à il y a 20 ans, la vie au sein des entreprises est soumise à davantage de « contraintes », de « stress » et de ce fait la gestion demande de « se dépasser » plus qu’à cette époque (même si je ne travaillais pas il y a 20 ans).
Ce « dépassement » peut s’exprimer justement par une créativité exceptionnelle et/ou des talents exceptionnels (quelque soit le domaine : gestion des relations humaines, des projets, la créativité…) qui sont les piliers des entreprises.
Par ailleurs (et c’est probablement lié) les chemins professionnels s’individualisent et il y a une libération par rapport à 20 ans de l’entreprise(où on voyait sa carrière tracée dans une entreprise)…voilà pour ma réflexion. Salut.