Comme je l’ai indiqué dans le dernier post, l’entreprise peut – quand elle souhaite implémenter un réseau social d’entreprise (RSE) – être confrontée à de nombreux paradoxes. Pour autant, je reste convaincu que l’usage d’un RSE peut être très bénéfique à l’entreprise, pour peu qu’il réponde à une stratégie bien définie.
Tout d’abord, notons que les retours d’expérience des entreprises ayant implémenté un RSE mettent clairement en évidence qu’il doit s’agir d’une initiative « top-down » portée par la direction générale, ou a minima la direction des ressources humaines. Pour éviter les trop nombreux paradoxes évoqués dans le post précédent, un RSE doit résulter d’une volonté clairement exprimée de la direction d’impliquer davantage les collaborateurs dans la gestion de leur propre carrière.
Il s’agit de laisser les collaborateurs s’exprimer sur leur parcours et leur formation professionnels, leurs compétences, leurs souhaits de mobilité, leurs aspirations concernant leur carrière, leurs attentes concernant leurs conditions de travail, etc. En retour, cela nécessite que les managers et les RH soient organisés pour pouvoir traiter ces éléments et revenir vers les collaborateurs avec des réponses. Ce qui importe ici n’est pas tant de répondre favorablement à toutes les demandes mais plutôt de montrer qu’elles sont prises en compte.
Ce type de démarche peut-il être adopté par toutes les entreprises ? Bien sûr que non ! Une telle démarche doit bénéficier d’une conjonction favorable d’éléments : une stratégie de l’entreprise en matière de gestion des carrières propice à « l’auto-portance », une culture de la communication assez ouverte, une maturité des processus RH favorisant la réactivité, etc.
D’autre part, la philosophie d’auto-régulation portée par les réseaux sociaux peut être bénéfique à l’entreprise si elle s’applique à des processus pouvant tirer profit de cette philosophie.
Le fait que les collaborateurs recommande aux membres de leur réseau les formations qu’ils ont apprécié peut éviter aux RH d’avoir à « vendre » leur plan de formation pour que les collaborateurs s’inscrivent aux sessions.
Même chose pour les opportunités intéressantes de la bourse à l’emploi interne. A-t-on vraiment besoin de s’abonner à l’aide de critères aux offres d’emploi que l’on souhaite suivre quand on est tenu au courant en permanence des offres intéressantes au sein de son réseau ?
La création d’un groupe dont les participants sont les acteurs réunis sur un projet peut éviter l’usage intempestif des emails et la mise en circulation de 14 versions du même fichier Excel de suivi de projet…
Cela n’implique en rien que le projet ne soit pas managé comme il se doit dans la « vraie vie », loin des réseaux sociaux, mais ce type de technologies, quand elles sont bien utilisées, peuvent au contraire fluidifier l’activité des managers.
Et puis soyons clairs : ce n’est pas le RSE qui va créer du liant social entre les collaborateurs. Rien ne vaut la machine à cafés, les opportunités de se retrouver hors du boulot, ou encore des évènements forts partagés en équipe. En revanche, c’est bien pratique d’apprendre que son voisin de bureau à qui l’on a peu l’occasion de parler a vécu 3 ans au Japon quand on est en négo avec des japonais. Ou d’apprendre que son manager a travaillé lors une précédente expérience dans une entreprise que l’on doit démarcher. Que sait-on vraiment des collaborateurs que l’on croise au sein de l’entreprise, ou même avec lesquels on travaille ? Un RSE peut assurément permettre d’en savoir plus sans avoir à consulter LinkedIn ou Viadeo.
Finalement, on peut se demander si la gestion des talents n’est pas la meilleure application des réseaux sociaux en entreprise. L’un des deux objectifs fondamentaux d’une démarche de gestion des talents est de personnaliser la relation de l’individu au travail afin d’assurer son engagement et sa motivation, et les renforcer. L’autre objectif est de mettre en cohérence les processus RH de l’entreprise afin de renforcer la performance et l’employabilité des collaborateurs.
Il semblerait bien que les fonctionnalités des RSE trouvent un parfait écho avec ces deux objectifs. Un RSE viendrait ainsi apporter des fonctionnalités dynamisant une démarche de gestion des talents, décidée et mise en œuvre par la direction des ressources humaines, en partenariat avec les managers et les collaborateurs de l’entreprise.
La suite sur un prochain post 😉
Merci Alex pour cet excellent article.
Je me permets pour l’instant de soulever un sourcil interrogateur quant à l’usage d’un RSE pour la gestion des talents : n’est-ce pas limitant de positionner la gestion des talents en tant que personnalisation et mise en cohérence? Ne manque-t-il pas l’axe de projection vers une carrière?
Mais j’attends avec impatience la suite et je reste certain que nous aurons l’occasion d’échanger plus en détails.
Merci 🙂
Merci pour le retour !
En fait, la gestion des carrieres recouvre a la fois les processus d’évaluation, de mobilite, de formation, de revue de personnel, etc.
Mettre ces processus en cohérence, c’est-à-dire faire que les résultats d’un process alimentent les autres process et que les différents acteurs impliqués communiquent davantage, permet d’améliorer sensiblement la gestion des carrières au sein de l’entreprise.
Cet enjeu est donc bien couvert par une démarche de gestion des talents.
A très bientôt.
Alex