J’ai animé hier une table ronde au Palais Brongniart dans le cadre de Global RH organisé par RH&M. Etait présents à cette table ronde Christine Piel (Vivendi), Jean-Pascal Dusart (Cofiroute), Sébastien Biessy (Clarins), Arnaud Gien-Pawlicki (Apec) et Anthony Poncier (Lecko). La question posée était : « Le défi des réseaux sociaux d’entreprise, ou comment mobiliser ses talents pour innover? ».
Deux points ont particulièrement retenu mon attention :
Les réseaux sociaux d’entreprise ne peuvent plus s’appréhender isolément des réseaux sociaux externes
Il y a encore deux ans de cela, on pouvait passer une matinée entière à parler du réseau social d’entreprise d’Orange, ou d’une expérimentation Jive ou Bluekiwi au sein d’une entreprise.
Aujourd’hui, la discussion autour du réseau social d’entreprise s’étend assez rapidement autour de la problématique plus large des réseaux sociaux. Les réseaux sociaux d’entreprise visent la plupart du temps à faire davantage collaborer les gens entre eux, à accélérer ou rendre possible les mises en relation, afin de faciliter l’innovation et le transfert de connaissances. Dans la plupart des cas, ces conversations n’alimentent pas de processus métiers ciblés.
A l’inverse, les réseaux sociaux professionnels tels que LinkedIn ou Viadeo, ou grand public tels que Facebook, peuvent directement supporter un processus de recrutement et le travail de l’entreprise sur la marque employeur. De fait, comme le faisait remarquer Anthony Poncier : « A défaut de pouvoir démontrer un ROI, on peut apprécier la valeur de ce qui est produit grâce aux réseaux sociaux ». En l’occurrence, permettre à l’entreprise de toucher un public plus large pour susciter l’intérêt, créer plus de proximité avec des internautes pouvant se muer un jour en candidats, propager une offre d’emplois de façon virale, etc.
La valeur des réseaux sociaux d’entreprise doit donc être tangible car elle va être à présent systématiquement comparée à celle des réseaux sociaux externes, même si les usages et apports attendus sont bien différents !
Par ailleurs, les collaborateurs à qui l’on demande de compléter leur profil sur le réseau social d’entreprise l’ont déjà fait en moyenne trois fois sur des réseaux sociaux externes. La question maintes fois posée de l’interopérabilité entre réseaux sociaux concerne donc aussi les réseaux sociaux d’entreprise, qui vont devoir permettre d’importer les informations déjà remplies sur d’autres réseaux.
L’opposition vie privée-vie professionnelle est remplacée par l’opposition vie privée-vie publique
Toute la problématique autour de l’usage de Facebook pour le recrutement renvoie à la problématique de la violation de la vie privée par les recruteurs. Dans l’esprit d’encore un grand nombre de personnes, Facebook c’est pour les copains et pas pour les recruteurs. Ces derniers peuvent aller LinkedIn et Viadeo pour faire leur boulot ! Mais quid des clients qui demandent à être vos amis ? Et de vos collègues ? Si l’on a sympathisé avec eux dans le cadre du travail, resteront-ils avant tout des collègues que l’on souhaite bien distinguer de nos amis, ou bien peuvent-ils rejoindre le cercle plus ou moins fermé de nos contacts ? Et doit-on ignorer toutes les personnes rencontrées dans la sphère professionnelle qui nous envoient des messages sur Facebook parce qu’ils font partie des 25 millions de membres de Facebook en France, et pas des 3,5 millions de membres de LinkedIn ?
Force est de constater que si chacun peut définir sa propre politique en la matière, la question de la frontière entre vie privée et vie pro se pose de plus en plus souvent.
Il est ressorti ce matin que la séparation à prendre en compte aujourd’hui était entre vie privée et vie publique, plutôt qu’entre vie privée et vie pro ! En effet, avec Facebook, il est tout à fait possible de définir des listes (les amis, les collègues, les clients, les quasi inconnus, …) et décider de ce que l’on souhaite faire et partager avec chaque liste. Les cercles de Google+ donnent une illustration plus compréhensible du côté « qu’est-ce que je partage avec qui », dommage que peu de gens l’utilisent….
Je vais citer pour la nième fois Dominique Cardon et ses dimensions « phare » et « claire-obscure », qui résument parfaitement cette dichotomie vie privée-vie publique.
La dimension phare c’est ce que l’on a envie de faire savoir au monde, quand la dimension claire-obscure est plus intime et est partagée avec parcimonie auprès de quelques privilégiés.
Si à ces deux points on ajoute le fait que même que l’on peut accueillir sur un réseau social d’entreprise des membres qui ne sont pas des collaborateurs mais sont des clients, partenaires, consultants, on se demande vraiment où sont passées les frontières de l’entreprise….
Excellent compte rendu , néanmoins une seule chose me chagrine, peut on arrêter de parler de réseau grand public vs réseau professionnel pour Facebook. Facebook est un réseau sur lequel on peu avoir des usages professionnels largement plus étendus que sur Linked in ou Viadeo ( boutiques e-comemrce, modules e-learning, etc…. ), la seule chose qui change est que l’usage n’est pas guidé ni guidable par un manuel … Il me semble plutot que Viadeo et Linkedin ( dans une moindre mesure ) sont des réseaux sociaux de première génération ou 1.5 , alors que Facebook et twitter sont des réseaux plus ouverts qui permettent à chacun de créer les usages qu’ils souhaitent y compris de très nombreux usages professionnels , mais en réel mode 2.0 , sans dogme ni frontières autres que l’imagination sans borne des utilisateurs … Voilà c’est dit … D’ailleurs à quand l’avènement de réellee solutions aussi souples dans les Réseaux sociaux d’entreprises qui sont encore très (ou trop ) normatifs pour être réellement attractifs !!! A très bientôt
Salut Vincent !
J’aime bien l’appréhension de LinkedIn en 1.5, c’est une bonne image 🙂
Je mets souvent en avant dans mes différentes interventions, notamment au salon SIRH, qu’il y a encore peu de temps, on avait de LinkedIn un usage plus proche de celui d’un job board que d’un réseau social : peu de conversations, peu de commentaires, etc.
LinkedIn a fortement investi sur le produit et ses fonctionnalités et je pense que c’est en train de devenir un vrai réseau social (professionnel ;).
La distinction que je fais et qui t’agace vient du fait qu’initialement, l’usage de Facebook était privé et celui de LinkedIn ou Viadeo professionnel.
Mais comme le disent très bien Béguin et Rabardel, il faut transformer l’outil en instrument !
On peut très bien transformer LinkedIn en un job board si l’on ne converse et l’on ne collabore pas, et transformer Facebook en réseau professionnel si on s’en sert pour recruter, candidater, apprendre, innover, etc.
La mutation est en train se s’opérer mais je constate tous les jours, auprès de mes clients, d’étudiants, que Facebook a encore un peu de boulot à faire pour que la mue s’opère. Perso, j’y crois !
Encore merci et à bientôt.
Alex
Quoiqu’il en soit on a passé une super matinée même si on aurait pu parler un tout petit peu plus de RSE. C’est pas grave, ça nous fera une excuse pour recommencer une jolie matinée comme celle-là. Et bravo au marketing de Talentsoft, elles ont assuré les filles. Merci beaucoup Alex
Salut Anthony.
Tout d’abord, un grand merci à toi !
Finalement, est-ce que tu ne penses pas que le fait que la discussion ait effectivement tourné à l’avantage des réseaux externes plutôt que des RSE signifie que les RSE ne sont pas assez perçus comme porteurs de valeur (même si c’est probablement faux) ?
++
Non je ne crois pas, c’est surtout parce qu’on a suivi les slides qui étaient plus orientées externes et que tu es peut-être plus à l’aise sur les médias sociaux que sur les RSE. Et pour la marque employeur les gens voient plutôt le côté externe, qu’interne.
C’est pas grave on va remédier à cela 😉