Gestion des talents : bilan 2010 et tendances 2011

Pour préparer cette fin d’année 2010 et début d’année 2011, le site MyRHLine m’a demandé de rédiger une tribune, publiée sur le site, sur le thème : « Gestion des talents : bilan 2010 et tendances 2011 ».

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Le marché de la gestion des talents a beaucoup changé en 2010. Il y a encore quelques années les entreprises se demandaient comment allait être reçue l’idée d’informatiser les entretiens annuels d’évaluation. Aujourd’hui elles se demandent comment tirer parti des réseaux sociaux dans leurs solutions logicielle.

Les changements majeurs sur ce marché en 2010 sont d’ordre organisationnel et technologique.

Du côté organisationnel, les acteurs des ressources humaines ne souhaitent plus travailler en silo sur un processus tel que le recrutement, la formation ou la rémunération, mais souhaitent au contraire mettre leurs informations en commun et s’impliquer sur des projets d’accompagnement des collaborateurs en prenant en compte tous les processus de façon intégrée.

En effet, comment un responsable formation peut-il bâtir son plan sans bénéficier de toutes les informations issues des entretiens professionnels ou des entretiens annuels d’évaluation ? Comment un manager peut-il parler d’augmentation ou de bonus à un collaborateur sans avoir une vue sur le niveau d’atteinte de ses objectifs ? De façon plus générale, la direction peut-elle parler de planification des talents et de la stratégie de demain sans avoir une vision relativement fidèle de son capital humain actuel ? Ces  processus doivent être vus de façon globale, à 360°, et c’est dans cette logique que doivent être conçues les solutions logicielles.

L’un des enjeux clés de l’année 2010 pour les RH a consisté à s’organiser de façon a éviter les silos et à s’outiller en conséquence. Les logiciels de niche (ou « best of breed ») dédiés au domaine de la gestion des talents se renforcent ou se repositionnent peu à peu sur ce que l’on appelle la « gestion intégrée » des talents. Pour ces logiciels, l’enjeu n’est plus d’être le champion de la formation ou du recrutement mais bien d’être capable de gérer la carrière des collaborateurs d’un point de vue global et transverse, en faisant communiquer des processus jusqu’alors cloisonnés. Ainsi, un collaborateur en sortie d’entretien professionnel se verra proposer automatiquement les trois formations qui pourraient l’aider dans la tenue de son poste. Les responsables du recrutement obtiendront en deux clics la liste des candidats pressentis à un poste, en se basant sur leurs souhaits de mobilité, leurs compétences et leur rémunération actuelle.

Au sein des multinationales, et également dans tous les groupes comportant de multiples entités, la question de l’harmonisation des pratiques RH entre le siège et les entités a également été au cœur de nombreuses problématiques. Force est de constater que dans la plupart des cas chaque entité dispose de ses propres entretiens d’évaluation, bâtit un plan de formation de son côté, gère son vivier de candidats à sa façon, etc. Pire encore, un responsable des ressources humaines d’une entité peut ne même pas avoir accès au dossier d’un collaborateur appartenant à une entité voisine, ce qui nuit fortement aux passerelles de mobilité.

De nombreuses démarches ont donc été menées afin de bâtir un « socle RH » commun permettant notamment de connaître tous les collaborateurs d’un groupe et pas seulement ceux d’une entité donnée, de mener des entretiens d’évaluation sur des formulaires similaires, d’accéder à un vivier de candidats partagé, de disposer de référentiels emplois et compétences uniques avec des accès personnalisés selon la filiale à laquelle on appartient, etc.

Sur le plan technologique, les deux points précédents ont eu un « effet de bord’ inattendu sur le marché des logiciels de niche dédiés à la gestion des talents. Aujourd’hui, les entreprises attendent de ces logiciels qu’ils puissent également gérer des données administratives tels que les permis de conduire, les certifications, les personnes à charge, les contrats de travail, etc. Dans certains cas, cela conduit les RH à devoir choisir entre un « pure player » gestion des talents et un ERP type SAP ou PeopleSoft. En plus de cet aspect lié à la gestion administrative des collaborateurs, tous les SIRH proposent maintenant un module permettant à chaque collaborateur de l’entreprise de compléter des informations le concernant de façon déclarative, comme on le fait sur les différents réseaux sociaux du marché. Il peut s’agir d’informations concernant le parcours du collaborateur au sein de l’entreprise ou hors de l’entreprise, des formations qu’il a suivies, de compétences qu’il détient mais n’exerce pas dans le cadre de son activité, etc. Ces « informations talent » viennent ainsi compléter les informations administratives dans le dossier du collaborateur.

L’intégration des différents processus, l’harmonisation des pratiques et la centralisation des données font naturellement émerger les tendances 2011.

« L’auto-portance » des collaborateurs, c’est-à-dire leur implication sur la construction de leur propre carrière, va se renforcer. Au-delà de la Direction des Ressources Humaines, ce phénomène est la suite logique de deux tendances combinées : l’influence de la génération Y sur le marché du travail, désireuse de trouver du sens à son activité et d’avoir toujours plus de responsabilités, et la montée en puissance de l’usage des réseaux sociaux (Facebook, LinkedIn, Viadeo, Twitter, etc.). Pour ceux qui penseraient encore qu’il ne s’agit que d’un effet de mode, le très sérieux Time magazine vient d’élire Mark Zuckerberg, le créateur et p-dg de Facebook, « homme de l’année ». On peut parier que l’usage des réseaux sociaux dans l’univers professionnel ne va cesser de croître.

Pour répondre à ce besoin toujours croissant d’auto-portance, nous pensons qu’il est nécessaire de porter un grand nombre de fonctionnalités des réseaux sociaux au sein des logiciels de gestion des talents, faisant ainsi de la gestion des talents la meilleure application des réseaux sociaux en entreprise. Recueillir de l’information directement apportée par les collaborateurs n’est pas une fin en soi mais ne prend véritablement son sens qu’en venant supporter les processus de l’entreprise. Les éditeurs logiciels doivent donc renforcer cette approche intégrée des processus.

De plus, les réseaux sociaux de par leur simplicité d’utilisation, leur ergonomie et l’usage quotidien qu’en font les utilisateurs, définissent un standard logiciel (timeline, page personnalisée, customisation, commentaires, « like », partage, etc.) auxquelles les applications d’entreprise doivent se conformer, dans un souci d’appropriation et de fidélisation.

Toutefois, les notions de confidentialité et de sécurité sont à prendre en compte. Nous avons tous suivi les nombreux problèmes liés à la vie privée et la confidentialité des informations qu’a rencontré Facebook. Il est donc essentiel de savoir adapter les fonctionnalités à la culture de l’entreprise et aux réglementations en vigueur au sein des différents pays.

Le besoin d’auto-portance va également pouvoir s’appuyer sur  les technologies nomades telles les smartphones et tablettes tactiles. Les smartphones peuvent permettre à chaque collaborateur de l’entreprise de rester connecté en temps réel à l’actualité RH de son entreprise en consultant son calendrier RH des événements à venir, en étant alerté des nouvelles offres d’emploi publiées sur la bourse à l’emploi ou de la validation de sa demande de formation par son manager par exemple. Les smartphones sont surtout utiles à des fins de consultation d’information. Les tablettes tactiles vont – du fait d’un écran plus large – davantage s’adresser aux managers et leur permettre de saisir des informations, en plus de la simple consultation : ils peuvent préparer leurs entretiens annuels, valider des demandes de mobilité ou de formation, apporter une annotation au dossier d’un collaborateur, etc.

Ces technologies nomades constituent un fort levier de fidélisation et d’appropriation des logiciels de gestion des talents, à prendre au sérieux et à intégrer dans l’offre proposée aux entreprises.

Enfin, le recrutement va probablement poursuivre sa mutation comme en témoigne l’émergence des CV en ligne (DoYouBuzz.com), la refonte ergonomique de Viadeo (très orientée réseaux sociaux) et les nouvelles pratiques des recruteurs (visualisation systématique de Facebook et Twitter, « googlization » des candidats, etc.).

Dans le contexte économique actuel, il est essentiel de réaliser une veille soutenue de toutes ces tendances, organisationnelles, technologiques ou sociales, afin de faire de la gestion des talents une préoccupation quotidienne des RH, des managers, et de tous les collaborateurs, dans leur propre intérêt et dans celui de leur entreprise.