Comment j’ai tué Foursquare !

Foursquare est le premier réseau social entièrement dédié à la géolocalisation. La première question qui vient à quelqu’un qui vous voit faire un check-in (l’équivalent d’un « je suis là ») lorsque vous entrez dans un restaurant ou un magasin, c’est : « Ca sert à quoi ? ». La question est en général posée avec un subtil mélange d’étonnement et de consternation….

De là vous avez deux options :

  • « Ben… à rien« , ou
  • « Ben si, c’est génial, parce que si tu as un copain à côté et que tu ne le sais pas, et bien tu vas pouvoir prendre un pot avec lui. Tu vois ?« .

Vous pouvez aussi répondre de façon assez pertinente : ben c’est le pendant Social de l’application ‘Around me’ dispo sur les smartphones, qui permet de savoir quels sont les musées, restos, et autre centres d’intérêt qui se trouvent autour de l’endroit où l’on se trouve.

La réalité, c’est qu’en plus de tout ça, Foursquare bénéficie de la vague de « gamification » qui déferle au sein du grand public et des entreprises. Le principe est simple : comment transformer une activité de tous les jours en un jeu, avec ce qu’il faut de points et de badges gagnés (l’équivalent numérique des bons points que nous collectionnions à l’école).

En l’occurrence, plus vous faites de check-in, plus vous gagnez de points. Cela vous permet de vous situer dans un classement réunissant l’ensemble des membres de votre réseau. Car ne l’oublions pas, Foursquare c’est avant tout un réseau social. Ce que ce réseau a de particulier, c’est qu’il favorise les conversations au sein du réseau du fait de contextualiser votre activité.

Par exemple, lorsque l’un de vos amis check dans un cinéma, vous pourrez facilement lui poser la question : « Tu vas voir quoi ?« . Et deux heures plus tard, vous lui demandez : « C’était bien ». En ce qui me concerne, Foursquare est le réseau sur lequel je discute le plus avec mes contacts.

Foursquare vous permet en plus d’être le Mayor (le maire quoi…) d’un endroit à partir du moment où vous êtes la personne qui avez le plus « checké » dans cet endroit. Encore que l’algorithme de comptage réserve parfois quelques surprises puisque vous pouvez passer en une journée du « Vous êtes toujours le Mayor de » à « Vous êtes à 3 jours de devenir le Mayor de ».

Autre surprise de taille : vous pouvez checker dans un endroit où vous n’êtes pas ! Pire, dans un endroit dont vous êtes à plus de 20 kms…. On est alors confronté au problème suivant : doit-on suivre les règles (tacites) du jeu et ne checker que dans les endroits où l’on se rend vraiment, au risque d’être bon dernier du classement face à des membres pervers du réseau qui checkeraient à tout va et n’importe ou ?

Bien sûr, me direz-vous. Et pourtant, si gagner des points et être le premier du classement est votre motivation première, les risques de check-in intempestifs sont-ils vraiment si  improbables que ça ? Et dans ce cas, c’est l’escalade de check-in et la mort de Foursquare.

Sans compter que beaucoup de personnes ne check pas dans tous les endroits où ils se rendent, mais seulement dans les endroits qu’ils estiment dignes d’intérêt ou qui renvoient d’eux l’image qu’ils souhaitent véhiculer. Checker à l’opéra Garnier est peut-être plus chic que « Chez Mimile », checker au Silencio plus hype que checker au bowling, etc.

Au-delà de ces quelques réflexions relativement anecdotiques autour de Foursquare, cela pose le problème du déclaratif, et plus globalement des interactions, au sein d’un réseau social.

Il existe actuellement quelques applications mesurant votre influence sur le web ou au sein d’un réseau social spécifique. Je ne suis personnellement pas fan de ce type d’applications pour une raison simple : tout comme Foursquare, elle ne peuvent mesurer votre supposée influence qu’en se basant sur des critères quantitatifs, et non qualitatifs. Foursquare mesure le nombre de check-in, pas le fait que vous soyez vraiment à l’endroit où vous prétendez être.

Quelqu’un qui se verrait doter d’une forte influence au sein d’un réseau social peut très bien publier de nombreux documents d’une piètre qualité, commenter toutes les actions des uns et des autres sans que cela n’apporte la moindre valeur ajoutée, ou encore avoir un réseau de contacts très important sans pour autant connaître le quart des contacts en question…..

Ce billet renvoie finalement à la sempiternelle problématique bien connue des entreprises : les personnes récompensées ou promues sont-elles celles qui ont le mieux travaillé ; celles qui ont abattu le plus de travail indépendamment de critères de qualité ; ou celles qui ont le mieux communiqué sur le travail réalisé, quelle que soit la quantité ou qualité de ce travail ?

A l’écoute de vos remarques et commentaires 😉